Il se fraie un chemin parmi les passants. Il aime encore les
excès de cette ville qui lui permet de se souvenir et d'éloigner la
peur qui occupe ses mains inutiles. Il se laisse porter par cette
fraternité, par ce bercement d'une mélodie grave qui le rend
somnambule. Même sous la pluie venteuse qui agite les arbres
rachitiques, des fantômes sur Broadway. Son corps orphelin
embrasse l'ombre, le faux-semblant de la nuit qui approche.Un saxophoniste noir, un ange exterminateur revenu du Viêt-nam, un
restaurateur florentin, un photographe japonais, un chauffeur de taxi
russe, un jeune homme issu d'une famille nazie : il faut de tout pour
faire un monde. Or il arrive que le monde soit New York, grand
creuset culturel, immense fourre-tout où l'humanité a rendez-vous
avec elle-même.Conjuguer son histoire personnelle au grand drame d'une ville qui
s'offre en représentation permanente, c'est tout un programme en ces
lieux où les mythes modernes se sont créés et sans cesse régénérés. Le
second recueil de nouvelles de Louise Cotnoir loge à l'enseigne de la
déambulation, les récits prenant le relais l'un de l'autre pour composer
le tableau d'une ville qui tient à la fois de l'île et du continent.