Assis sur le sable blanc au pied d’un amandier, Cornelius lance un caillou dans l’eau trouble de la petite anse. Il ne comprend pas ce qu’il lui arrive. Une bouteille de rhum à ses côtés, le regard brouillé, il ne ressent qu’injustice et bêtise. Il a tant fait pendant plus de vingt ans dans les forces de Police de Grenade. « On m’a tout pris, mon travail, ma famille, ma dignité ». La poitrine gonflée de sanglots retenus, il lève les yeux vers la branche qui le surplombe et revient vers la corde posée sur ses genoux. « Ça fera l’affaire » se dit-il. Encore incertain du geste qu’il va poser, ses mains tremblent en caressant le nœud coulant.
Sur la rive, une petite chaloupe antillaise, peinte aux vives couleurs de Grenade, est offerte aux persécutions des vagues qui la basculent d’un bord à l’autre au bout de son câble effiloché. À quelque vingt mètres au large, un vieux voilier abandonné se berce au bout de sa chaine. Ses voiles affalées sur le pont laissent échapper des rubans de guenil